Le dépistage du cancer du sein sera moins bien remboursé à partir du 1er avril
A partir du 1er avril 2018, il y aura du changement dans le remboursement des examens de dépistage du cancer du sein. Et pas dans le bon sens pour les patientes… La ministre de la Santé, Maggie De Block (Open VLD), a décidé, pour les patientes qui ne font pas partie du groupe restreint des femmes à (très) haut risque, de limiter, voire de supprimer le remboursement des mammographies de dépistage individuelles.
L’arrêté royal publié au Moniteur du 26 février dernier précise ainsi qu’il n’y aura plus de remboursement pour les femmes âgées de moins de 45 ans ou de plus de 74 ans qui n’ont pas de profil à haut risque.
Plus tous les ans
Ce qui change ? Jusqu’ici, les femmes pouvaient bénéficier du remboursement dès 40 ans et après 74 ans. Autre modification : la mammographie de dépistage individuelle (remboursée) ne sera autorisée que tous les deux ans. “Depuis plus de dix ans, la commission nationale médico-mutualiste tente d’harmoniser la nomenclature relative à la mammographie de dépistage suivant les directives internationales. Elle essaie en même temps de réduire la surconsommation évidente ainsi que le cumul scientifiquement non justifié avec une échographie et/ou une résonance magnétique nucléaire”, justifie-t-on au cabinet de la ministre De Block. Conséquence : les échographies et les RMN ne sont plus remboursés qaund ces examens ont lieu le même jour.
Cette modification de la nomenclature vise avant tout à stimuler le dépistage systématique – une compétence communautaire : les femmes entre 50 et 69 ans peuvent, sur base volontaire, bénéficier tous les deux ans de cette mammographie de dépistage gratuite (baptisée “mammotest”).
Un “mammotest” auquel les Flamandes dans la tranche d’âge considérées (58 %) sont beaucoup plus assidues que les francophones (10 %). Au sud du pays, le dépistage systématique est complété par une mammographie individuelle, ce qui se fait nettement moins au nord du pays, relève le cabinet De Block. Raison pour laquelle il y a autant de réaction du côté francophone, décode le cabinet De Block.
La modification ne change rien pour les femmes avec une pathologie mammaire (dites sympromatiques).
“C’est un recul pour les patientes a risque intermédiaire”
Du côté des spécialistes du dépistage, la nouvelle nomenclature fait grincer des dents. Les gynécologues n’excluent pas un recours au Conseil d’Etat contre l’arrêté royal dans les prochaines semaines. “On discute depuis des années pour essayer de trouver la manière optimale de faire du dépistage. Ces modifications interviennent alors que les recommandations n’ont pas changé. On a été mis devant le fait accompli”, réagit le docteur Carine Van de Merckt, radiologue à l’Institut Jules Bordet et membre de la Société belge de Sénologie. “Notre crainte, c’est qu’on veuille aller encore plus loin en supprimant la mammographie de dépistage individuel pour ne garder que le mammotest”.
Pour les sénologues, cet arrêté royal constitue un recul pour les patientes. Pas pour les femmes à (très) haut risque de développer un cancer du sein, qui ne sont pas concernées. Elles représentent 5 à 10% de la population. “Mais cette nomenclature est préjudiciable aux patientes qui présentent un risque intermédiaire et pour lesquelles le remboursement d’une mammographie de dépistage individuelle n’est plus autorisé que tous les deux ans.” Soit l’intervalle prévu par le “mammotest” (sans palpation, échographie et autres examens complémentaires…). “Le mammotest est pourtant fort décrié et remis en question. Son efficacité n’est pas prouvée: on a trop de couacs entre deux examens: 30 % de cancers sont décelés dans cet intervalle”. Autre chiffre: 70 % des femmes qui vont développer un cancer du sein n’ont pas de facteur de risque, précise le docteur Van de Merckt.
L’exclusion des patientes âgées de 75 ans est un autre souci, pointe la sénologue. “Le dépistage d’un cancer du sein chez une patiente de 75 ans n’aura peut-être pas d’effet sur sa mortalité, mais bien sur son confort de vie”.